Pérou (II) : “Feliz retrouvailles”

La deuxième partie de mon (premier) passage au Pérou peut être résumée par cette heureuse expression de Myriam : ce furent de fort joyeuses retrouvailles !

On s’est tout d’abord retrouvé avec Arthur et Camille dans un hostal qu’un ami de Quito m’avait recommandé. C’est l’hostal le moins cher de mon voyage pour l’instant. C’est très très roots. Je commence dans un “dortoir” : une chambre de trois lits où on dort à 4, il n’y a pas du tout de place pour mettre les affaires. Mes camarades de chambre sont des viajeros, ces gens qui voyagent et “ne sont pas des touristes” comme il y en a tant en Amérique du Sud. Il y a deux Colombiens et une Chilienne et ils voyagent en faisant de la musique, du jonglage ou en vendant des babioles dans la rue. Ils sont très sympa, mais prennent beaucoup d’espace et ne comprennent pas que je n’ai pas forcément envie de vivre comme eux, de faire comme eux, de fumer comme eux ou d’écouter la même musique que eux. En deux nuits, ils me saoulent tellement, que je décide de me barrer en tente dans la cours/jardin de l’hostal. L’hostal lui-même est très basique mais ceux qui s’en occupe (un mec, son cousin, un de ces potes et plus ou moins une voyageuse qui loge ici la moitié de l’année) sont très sympas et attentionnés. Cela dit ça manque d’eau chaude et d’un peu de propreté (je deviens tatillon…).

Cusco est une ville dans une vallée évasée et les bords de la ville remontent sur les pentes des colines. Ces (beaux) quartiers ne sont souvent accessible qu’à pied. C’est ainsi que pour monter à l’Aguaymanto, notre hostal, il fallait d’abord monter environ 300 marches (Camille les a comptées, si si) a 3500m d’altitude. Autant dire, que quand on descend en ville se promener, on s’amuse pas à faire des allers-retours. Il paraît qu’à Cusco, plus tu monte, plus les hostal sont bon marchés (sans mauvais jeux de mots). Et en récompense de tes efforts d’avare, tu peux jouir d’une super vue sur l’ensemble de la ville. C’est une belle ville, avec un centre historique colonial bien préservé, construit sur les ruines (partiellement apparentes) des bâtiments et édifices Incas. Comme c’est la période de noël, de nombreux habitants des villages voisins descendent en ville pour vendre plein de trucs sur le marché de noël et la place principale. Ils dorment dans les rues le soir et il y a beaucoup d’activités : des distributions de cadeaux, des spectacles de rue, des soupes/repas etc. L’ambiance est particulière avec des rues remplies de monde, pleins de pétards et de feux d’artifices qui sautent à toutes heures du jour et de la nuit (avec Camille, on est trop content et on en achète plein du coup), des gens qui vendent de tout et de n’importe quoi dans tous les sens, des Cholitas dans leurs plus beaux habits colorés avec des micro-llamas vivants dans les bras ou des plus gros llamas en laisse qui demandent à se faire prendre en photo en échange de quelques soles.

Souvent, il fait pas si beau à cusco à cette époque. Le ciel ensoleillé vire régulièrement au gris et à la pluie dans la même journée. Quand il pleut on essaye de se trouver un endroit sympa où se poser (et avoir Internet). On retrouve Myriam et Dom le samedi matin, le 24, et on se balade ensemble la journée. Le marché de Cusco, comme souvent les marchés au Pérou (et dans le reste de l’Amérique Latine ?) est super avec plein de chocolats (yeah) et de cafés, de jus de fruits, de “restaurants” (c’est plus des foodstalls à l’asiatique), de viandes, de légumes et fruits, de pains, d’herbes diverses, variées, étranges, médicinales ou magiques, de fleurs, d’artisanats etc. C’est un peu bordel très organisés en quartiers rassemblant ceux qui vendent le même type de choses. J’adore les marchés ici. On y mange les midis, parce que c’est pas cher, on y boit le jus de fruit du dessert, on y achète le chocolat et la coca qui, mélangée à la llicta (cendre d’arbres fruitiers), permet de combattre le mal d’altitude. Ca anésthésie la bouche aussi. Ca occupe. Il paraît que ça coupe la faim et la flemme. Ce qui est sûr c’est que quand j’en mâche trop souvent, ça a tendance à irriter la bouche. Mais C’est bien efficace en altitude.

On fête noël tous ensemble autour de bonnes bières. Au Pérou, ils se sont mis à faire des bières artisanales (j’ai cru comprendre que ça fait pas si longtemps) qui sont, pour certaines, vraiment pas mal. Et comme on aime ça, on s’applique à goûter sérieusement cette production locale. On s’offre des cadeaux, on fête le ptit Jésus, on rigole. Dom se fait voler son sac aussi à un moment. Joyeux Noël. Mais ça ne suffit pas à pourrir cette belle ambiance de retrouvailles générales. C’est quand même sympa de se revoir toutes et tous ici, de ce côté-ci du monde, au Pérou où aucun de nous n’était jamais allé. Le soir, Arthur, Camille et moi, on remonte à l’hostal où tout le monde fait la fête autour d’un gros repas et de pas mal de bouteilles. A partir de 23h30/minuit, on a l’impression que tous les habitants et habitantes de tous les quartiers de Cusco se mettent à faire péter des pétards de feux d’artifice. Il faut imaginer voir une ville de bonne taille face à soi et ne pas savoir où poser les yeux. De partout partent des fusées, petites, grandes, moyennes, blanches, jaunes, vertes, rouges, bleues, des qui foirent, des qui montent haut, des très bruyantes, des avec des formes de spermatozoïdes qui grimpent vers les nuages, des explosions fugaces. Et cela de partout en même temps et en décalé dans toute la ville. Et ça dure. Ca dure longtemps. C’est le plus beau feu d’artifice que j’ai jamais vu. C’est pas un truc organisé, centralisé, orchestré, monté et pensé. C’est presque une compétition entre quartiers, à qui aura le dernier mot, la dernière fusée. Pendant une heure, c’est très intense et l’air se charge d’une forte odeur de poudre, des nuages de fumées se forment en altitude. Mais ça continue jusqu’à bien après que l’on se soient couché.

 

Après noël, on décide de sortir de la ville, de trouver un endroit où se poser tranquillement, une petite ville ou un village. On décide donc d’aller à Pisac, un lieu que Mazzi m’avait recommandé. C’est un peu le Vilcabamba de Cusco, avec plein d’étrangers qui habitent là, qui font de la permaculture ou des bars, on peut y trouver au moins deux “Shaman Shops” où sont vendus de nombreux rapés ainsi que du San Pedro et autres ustensiles pouvant te reconnecter à la Pachamama, aligner tes chakras etc. C’est en plein de la vallée sacrée des Incas, une valles qui est bien longue, jalonnée par de nombreuses ruines et autres vestiges pré-colombiens, et descend jusqu’au Machu Pichu. On s’y trouve un hostal où on a des chambres sur la terasse avec une cuisine, un salon, une salle de bain. On est chez nous, nous dit, avec insistance, la logeuse. C’est là une petite bourgade tout ce qu’il y a de charmante, au pied d’un large complexe archéologique. On dirait que les Incas sont comme tous les empires : les soldats, les prêtres et les castes hautes en haut de la montagne, et le paysans et les classes laborieuses, en bas au travail. Alors forcément, nous, enfin Arthur, Camille et moi, on veut aller visiter ces tas de cailloux. Mais ça coûte super cher. C’est pas possible de payer juste pour un site, nous dit-on, il faut absolument prendre un billet, vachement plus cher, pour aller voir 150 sites en trois jours. Bien sûr c’est plus cher, mais vous pouvez voir 150 sites, en trois jours. Merveilleux. On essaye d’y aller en fraudant (pour faire honneur à la réputation des Français quand même), mais on se fait quand même refouler. Finalement on décide d’aller voir d’autres endroits, habités par des gens qui vivent encore (maigre consolation, certes). On part donc tous les cinq et on monte, on monte, on monte. Le chauffeur du taxi (oé on y va en taxi, y a pas de bus, ils font grève) n’aime que trois chansons qui passent donc en boucle (à l’aller comme au retour). La montagne est très belle, verte avec des beaux rochers. Bien sûr, il ne fait pas très beau mais on a tous (sauf Myriam) emmené de quoi se couvrir. Arrivé en haut, il y a une communauté autochtone et plusieurs lac. On se lance dans une petite balade qui se transforme en petite rando pluvieuse. Les paysages sont superbes. Mais c’est humide et frais. Un mélange de ce que j’imagine être l’Irlande, avec des montagnes à 4500m d’altitude. Pas mal du tout.

Ainsi va la vie à Pisac, tout doux. Des balades, des session d’acroyoga, des jus de fruits, des bières, des jeux. Au nouvel an, avec Camille on a prévu le coup, On achète un petit stock de pétards et de feux d’artifice pour faire honneur. On commence l’apéro, on continue l’apéro puis arrive bientôt l’heure fatidique (factice, occidentale, coloniale, imposée, fêtée, réjouissante etc) pour faire sauter tout notre arsenal. Mais en assez peu de temps on a fini autant nos provisions d’explosifs que d’alcool. On part donc avec Dom en expédition de réapprovisionnement. Le centre ville est rempli de vendeuses de pétards et de feux d’artifice (ouf ! tout n’est pas perdu !), de confettis et de fleurs avec pleins d’enfants, de jeunes et de moins jeunes qui courrent, s’excitent et s’extasient, dans le feu de la fête, les veines chargées d’énergie, d’adrénaline, de joie et, peut-être, d’autres substances. On fait un plein de poudres et d’alcool et on reviens bien vite à l’hostal devant lequel on cherche à attirer l’attention d’Arthur, de Camille et de Myriam pour leur faire une démonstration de notre nouvel arsenal. Comme ils ne daignent pas nous montrer leur doux visage, on décide quand même de faire sauter notre plus grosse munition. Un succès ! Une merveille qui fait trembler l’ensemble des vitres du quartier et fait partir l’alarme d’une voiture garée à proximité. Plus tard on ressort, on retourne acheter quelques pétards. On croise des policiers que j’arrive, entre les brumes piscolisées de mon cerveau, à convaincre de participer à notre petite fête pyromane. Finalement ils se laissent prendre au jeu et ils ont l’air de bien aimé. On arrive à un bar, tenu par un Italien, où de la cumbia jouera en live toute la nuit. Et s’ensuit un moment de danse effrénée jusqu’au petit matin. Au retour à l’hôtel, Arthur se rend compte qu’il a perdu la clef de la chambre. On fait le tour de l’étage puis ils repartent avec Camille sur nos pas. Après un long moment ils reviennent avec la clef qui se trouvait en fait dans la poche d’Arthur…

Et puis viennent les adieux. Enfin les au revoir. On s’embrasse, avec effusion, bien sûr. On se fait de nombreuses promesses de jours futurs meilleurs et bien-heureux (après tout, 2017 c’est bien l’année de la fête non ?), de se revoir en Equateur, en France, au Canada, ailleurs, qui sait ? Et puis on part pour Cusco avec Arthur et Camille. Les mouchoirs dégoulinant de larmes (ou est-ce autre chose ?) de Dom et Myriam s’agitent dans le vent tourbillonant derrière le mini-bus. A Cusco, on va à la gare des bus chercher un trajet pour Arequipa. Tout est plein, tout est cher. Rien ne part ce soir. Revenez demain. Finalement on trouve l’entreprise qui a le dernier bus avec de la place. Et on comprend pourquoi… Bienvenu sur la Universal ! L’entreprise qui peut rivaliser avec les trajets népalais et indiens ! Ici, les genous ne rentre pas sur les sièges. Ici, les informations concernant votre trajet seront retenu pour ne pas vous effrayer ! Finalement c’est juste long et inconfortable avec des arrêts et un changement de bus au petit matin. Ca crée des liens. Ma voisine étudie l’administration et retourne en cours à Arequipa. La mère de devant nous offre des goodies à base de maïs.

Plus on descend vers Arequipa, plus c’est sec. Et tout ce sable et toute cette sécheresse, ce sera comme ça jusqu’à Santiago, plusieurs milliers de kilomètres au Sud. Arequipa, c’est une oasis entre des montagnes et des volcans, secs, bien entendus. C’est une ville coloniale et industrielle gigantesque. Le centre ville est très beau. Des places italiennes, des arcades espagnols, de la nourriture et de la musique péruvienne et des bières locales d’inspirations américaines et belges. La belle vie. L’hostal lui-même a un charme rétro magnifique, avec des balcons et des cours internes, des grandes pièces hautes de plafonds et sa collection de machines à écrire. On passe nos journées à déambulait dans la ville, j’arrive à travailler un peu de temps en temps, on goûte les bières, on s’installe au marché (encore mieux que celui de Cusco), on joue à des jeux, on profite. Arequipa c’est une ville que j’ai bien aimé. Ses monastère et son couvent gigantesque, son marché qui fête son anniversaire en énorme farandole carnavalesque où les différents secteurs (commerciaux) du marchés lances des produits. Qui des bonbons, qui des fleurs, d’autres des patates, des os en plastique pour chiens, des fruits…

Et puis vient le temps de partir vers le Sud. Camille doit aller, assez rapidement, jusqu’à Coquimbo, au Chili, pour travailler une ultime fois sur ce continent. On prends un bus un matin jusqu’à Tacna, la frontière avec le Chili, on arrive l’après-midi, on traverse la frontière et on arrive le soir à Arica. On décide d’y rester la nuit avant de reprendre un bus de 24h pour Coquimbo. Arica, de nuit, c’est une ville frontière. De jour aussi d’ailleurs. Il y a probablement des aspects le fun dans cette ville, mais on l’a pas vu. On passe la nuit dans un très digne représentant des hôtels frontaliers, ces bouges immondes où tu ose pas trop dormir de peur d’attraper la peste et la lèpres après avoir était détroussé par les tenanciers véreux. Bien heureusement, rien de tout cela ne se passe, même si les draps étaient douteux et les propriétaires très probablement magouilleurs. C’est bizarre d’être de nouveau de retour au Chili. Bientôt Santiago je me dis. Avant on a 2500km à faire en bus et on va s’arrêter à Coquimbo, une ville portuaire que je ne connais pas… Il fait beau, il fait chaud, il fait sec.

PS : Certaines photos ont été prises par Arthur et Camille, mais je sais plus lesquelles… Qu’ils en soient remerciés !

 

Pérou (I) : mer, villes, reprise du voyage

Voilà un mois que je n’ai rien mis sur le blog mais j’ai été occupé et la lenteur des connexions rencontrées m’ont découragées. Bref que d’excuse.

Voilà presque un mois je partais de Chambalabamba, un petit pincement au cœur. Même si ce n’est pas ce que je cherchais pour ma thèse, j’ai rencontré des gens forts sympathiques, je me suis remis à jouer (pour un court moment, certes) à la batterie, je me baignais dans des rivières et nageais dans des déluges diluviens (de pluie). Bref, c’était le retour de la fameuse “easy life”, celle de la sédentarisation (temporaire), des bons amis et d’une vie qui s’écoule paisiblement, bien rythmé avec des surprises prévisibles et enchanteresses. Mais il était temps de repartir à l’aventure (youhou) et d’aller retrouver le Nart, Camille et Dom et Myriam pour passer une joyeuse fête du ptit Jésus et le renouvellement du calendrier grégorien (paix à son âme).

J’ai donc pris un bus de nuit pour traverser subrepticement et légalement la frontière péruvienne. Tu y arrive vers 3h du matin, il y a un pont, comme dans un bon James Bond, tu te fais tamponner le papier d’un côté puis tu traverse à pied, serrant les fesses, entouré de chiens hurlants et de militaires à moitié endormis pour arriver sur le sol péruvien à faire retamponner tes papiers et être un voyageur légal. Puis c’est reparti et on arrive le matin à Piura. Et Piura c’est pas joli, enfin ce que j’en ai vu mais j’avais pas l’intention d’y rester. Cela dit, il y a un petit côté Asie du Sud (-Est) que je retrouverai un peu partout au Pérou et qui n’était pas là en Equateur. Il y a plein de petites voitures un peu déglinguées, des rikshaw-moto et du monde dans tous les sens même le matin. Mais je prends directement un bus pour Trujillo : je veux aller voir la mer. C’est 7h de bus, 7h de désert. En fait je crois (mais peut-être que je me trompe) que la côté pacifique sud-américaine, de vers Santiago au Chili jusqu’à la moitié de l’Equateur c’est pas mal que du sable et du désert. Finalement j’arrive à Trujillo après pas mal d’heures de voyage dans différents véhicules de différentes tailles et formes. De là, je me trouve un petit taxi pour filer directement à Huanchaco, à 20 km de là.

Huanchaco, c’est une petite bourgade de surfers sur le bord de l’océan. C’est sec, y a pas beaucoup d’arbres. Mais la mer a des vagues très belles et grandes et roulantes. Alors, je fais pas de surf, mais j’ai toujours aimé jouer dans les vagues. J’arrive, je salut l’océan en m’y plongeant dedans (drôle de salut, en vérité…) puis je vais me trouver un camping. Une fois installé, je pars visiter la petite ville, son front de mer, ses bars et ses plages. C’est le lieu des couchés de soleil cartes postales. Dans un bar/hostal je rencontre un couple d’anglais qui voyagent depuis un an. Ils sont super rigolo : lui ressemble à un faune, dans sa manière d’être à toujours rigoler, danser et s’abreuver, et elle n’est pas en reste. On dirait des gens sortis des légendes anglaises mais qui ne s’accomodent pas trop du monde dans lequel ils sont arrivés.

J’ai donc rencontré mes compagnons de baignades, de balades et de beuveries des prochains jours. Et, en effet, on passe nos fins d’après-midi à boire quelques bonnes bières devant le couché de soleil sur la mer, un truc que j’avais pas fait depuis un petit bout de temps (sauf en Gaspésie, mais fallait se battre contre les moustiques alors ça compte pas).

Huanchaco, et Trujillo, c’est des endroits qui font pensé un peu à l’Iran, bizarrement (avec la liberté de s’amuser en plus, j’imagine). C’est très désertique avec des montagnes qui ont l’air très vieilles, pleines de sables. Ca ressemble aux montagnes vers Yazd je trouve. Et puis Trujillo, comme Piura, ça a un côté asiatique, un peu bordélique avec de tout partout. Les marchés ressemblent aux bazars débordants qu’on peut trouver en Inde, au Népal ou en Thailande, ou même en Iran (mais quand même en moins clinquant). C’est pas une très belle ville, mais elle buzz de vie, de couleur, d’activités. Autour de Trujillo, il y a beaucoup de ruines et autres “complexes archéologiques” pré-incas. Des civilisation du soleil, du désert et de la mer qui, là encore, rappellent l’Iran. Des grandes constructions en terre, du marron-sable uniforme partout et des gravures belles et simples représentant le plus souvent des vagues, des poissons et des pélicans. A un moment (moyen âge européen), cette ville, qui s’appelle Chan Chan (et, donc, en plus de penser à l’Iran, je me chante du Buena Vista Social Club, c’est un drôle de mélange), faisait 20km de long et abritait environ 200 000 personnes, ce qui, pour l’époque, en faisait une sacrée cité. Mais quand on voit le côté aride de l’endroit, on se demande comment ils se nourrissaient. Mais j’ai pas plus exploré la chose que cela.

De Trujillo, je suis allé, de nuit, à Lima. Après des adieux déchirants et de nombreuses promeses de retrouvailles futures (à Montréal, en Equateur, en Angleterre, en France…) avec mes amis anglais, je monte dans le bus. Lima est une ville gigantesque enfin qui en a l’air. Il ya de nombreux quartiers différents et je n’en ai découvert que très peu. Je devais voir un ami d’ici mais finalement il était trop occupé dans la préparation d’un festival de psy et l’arrivée des fêtes de fin d’année. Donc je décide de découvrir la ville tout seul. Je pense que c’est chouette comme endroit si de gens qui y habitent te font découvrir des endroits cachés ou moins fréquentés. C’est un peu le problème de toutes les grandes villes : il y a à la fois trop de choses et trop de gens, et en même temps, tout seul, tu reste un peu seul et c’est plus difficile de sortir des chemins balisés. Cela dit, je passe quand même des moments rigolos et, parfois surréalistes.

J’arrive donc un dimanche matin. Je trouve un hostal et je repart l’après-midi au centre historique pour me promener. Arrivé là-bas, je tombe sur une large place, chargée de décorations de noël. J’arrive au moment crucial du changement de la garde présidentielle. Une fanfare de la marine péruvienne fait de la musique. C’est un mélange de musique militaire et de chants de noël. C’est à la fois très moche, dégoûtant et dégoulinant et très rigolo. La musique militaire… Je pense que c’est une déformation familiale, mais je trouve ça horripilant. Cela dit, je suis comme paralysé, obnubilé, je ne sais comment le dire, mais c’est fascinant ces militaires (des tueurs, en principes) qui jouent de la musique en l’honneur du petit Jésus et de la débauche commerciale. C’est rigolo et en même temps, ça montre la collusion du capitalisme, du système militaire et de la religion, c’est beau… De là, je vais au quartier chinois, on m’a dit que ça valait la peine. Si le reste des rues que j’avais croisées jusqu’ici étaient vides, là, c’est blindé. Du monde et du monde, à plus savoir qu’en faire. Les voitures ne circulent plus. Pourtant, les magasins sont pas incroyables : c’est tout kitsch et clinquant, surtout de la décoration de noël. C’est pas forcément le genre d’endroit où “on trouve tout”. Par contre il y a plein de “chifas”, des restaurants de fusion chinoise et péruvienne. Alors je m’arrête pour manger un bout avant de continuer ma visite.

Le soir, je tombe sur une “feria independiente del Peru” avec plein de petits stands. On se croirait un peu dans le Mile End, le quartier hipster de Montréal. Les mecs ont tous des barbes bien taillées avec des shorts et des t-shirts dans leur short et plein de tatouage. Les prix sont en moyenne 3 ou 4 fois plus chers qu’ailleurs. Mais je tombe sur un super concert de ska-punk et, donc, je reste un peu à profiter de cete musique revendicative. Le lendemain, je vais me promener dans Miraflores : le quartier bourgeois (plus plus) de Lima. Le front de mer ressemble à une série californienne : tout propre avec de grands immeubles modernes (semi-design). La côte, à Lima, est formée par une plage que longe une grosse route au-dessus de laquelle s’élève, sur tout le long de la ville, une haute falaise qui a l’air très friable.  A partir du haut de cette falaise, les constructions commencent. Mais le bord de la falaise est largement aménagé (surtout à Miraflores) en parcs avec des arbres et des fleurs, très joli. Il y a même des gens qui font du parapente du haut de cette falaise, emmenant des touristes en bi-place faire un vol entre les immeubles de la ville et au-dessus de la mer. La mer elle-même a l’air sale et est remplie de surfeurs et apprentis-surfeurs.

Un soir je me retrouve dans un restaurant créole (je sais pas trop ce que ça veut dire créole au Pérou, faudra que je me renseigne). C’est un peu chic, mais pas très cher, avec un pianiste qui joue. Il a l’air de s’ennuyer ferme. Comme je suis seul et que je m’assoie pas loin du piano. Il me parle un peu. Découvrant que je suis Français, il décide de jouer la Marseillaise. Il a l’air content de me faire ça alors j’ose pas lui dire que j’ai horreur de cette chanson de nationalistes guerriers. Il me donne sa carte. Si jamais vous passez à Lima et que vous avez besoin d’un pianiste qui peut jouer pour “toutes occasions” (notamment la Marseillaise, rappelez-vous) ou pour prendre des cours, c’est votre homme. Il est très gentil mais il a pas l’air super content de devoir jouer dans un restaurant un peu guindé où le seul à applaudir à la fin de ses morceaux, c’est moi…

Bref, Lima, c’était rigolo mais ça ne m’a pas enchanté plus que ça. Je pense que ça prend plus de volonté, plus de curiosité et peut-être des amis sur place pour faire découvrir. Puis c’est vraiment une grande ville. J’en repars au bout de quelques jours pour aller à Cusco, dans les montagnes, rejoindre Arthur, Camille, Dom et Myriam. C’est un long trajet de presque 24h. Je décide de prendre un bus confortable en me disant que comme c’est long, c’est mieux d’être bien assis. Ca commence pas si bien : on me change de bus, d’horaire, je poireaute un bon moment à la gare des bus. Mais, en soit, le trajet comment pas trop mal avec un coucher de soleil, un petit film. On met un bon moment avant de sortir de la ville. Dans la nuit, on s’arrête à plusieurs endroits. Ca monte, et ça monte en altitude. La nuit, on entend plusieurs personnes qui vomissent. Moi même je me sens un peu faible avec mal de ventre. Le soleil se lève sur un paysage magnifique : chaque vallée est différentes, l’une désertique, l’autre luxuriante, la suivant ressemble au Népal, une autre aux Alpes et la dernière à la mer Méditerrannée sans la mer.

Après ce long trajet, j’arrive enfin à Cusco. Je tremblotte, j’ai les guibolles qui flageollent, le tournis après avoir passé tant de temps assis et être arrivé assez haut en altitude. Finalement ça passe vite et je vais à la recherche de mon hostal. C’est très flou, je pense que Arthur et Camille, comme Dom et Myriam n’arriveront, au plus tôt que le lendemain, alors je veux me poser tranquillement et commencer à penser à faire des courses de noël. Finalement je trouve la rue et je commence à monter. Ca monte beaucoup. C’est long. C’est haut. Je fatigue. Je me maudit un peu d’avoir choisi cet hostal. Finalement j’arrive, je m’assied, je commence à discuter. L’un des gars sur place me dit que quelqu’un m’attendait. Le temps que je comprenne qui, Arthur arrive et s’ensuit une grande et belle embrassade.