Pérou (II) : “Feliz retrouvailles”

La deuxième partie de mon (premier) passage au Pérou peut être résumée par cette heureuse expression de Myriam : ce furent de fort joyeuses retrouvailles !

On s’est tout d’abord retrouvé avec Arthur et Camille dans un hostal qu’un ami de Quito m’avait recommandé. C’est l’hostal le moins cher de mon voyage pour l’instant. C’est très très roots. Je commence dans un “dortoir” : une chambre de trois lits où on dort à 4, il n’y a pas du tout de place pour mettre les affaires. Mes camarades de chambre sont des viajeros, ces gens qui voyagent et “ne sont pas des touristes” comme il y en a tant en Amérique du Sud. Il y a deux Colombiens et une Chilienne et ils voyagent en faisant de la musique, du jonglage ou en vendant des babioles dans la rue. Ils sont très sympa, mais prennent beaucoup d’espace et ne comprennent pas que je n’ai pas forcément envie de vivre comme eux, de faire comme eux, de fumer comme eux ou d’écouter la même musique que eux. En deux nuits, ils me saoulent tellement, que je décide de me barrer en tente dans la cours/jardin de l’hostal. L’hostal lui-même est très basique mais ceux qui s’en occupe (un mec, son cousin, un de ces potes et plus ou moins une voyageuse qui loge ici la moitié de l’année) sont très sympas et attentionnés. Cela dit ça manque d’eau chaude et d’un peu de propreté (je deviens tatillon…).

Cusco est une ville dans une vallée évasée et les bords de la ville remontent sur les pentes des colines. Ces (beaux) quartiers ne sont souvent accessible qu’à pied. C’est ainsi que pour monter à l’Aguaymanto, notre hostal, il fallait d’abord monter environ 300 marches (Camille les a comptées, si si) a 3500m d’altitude. Autant dire, que quand on descend en ville se promener, on s’amuse pas à faire des allers-retours. Il paraît qu’à Cusco, plus tu monte, plus les hostal sont bon marchés (sans mauvais jeux de mots). Et en récompense de tes efforts d’avare, tu peux jouir d’une super vue sur l’ensemble de la ville. C’est une belle ville, avec un centre historique colonial bien préservé, construit sur les ruines (partiellement apparentes) des bâtiments et édifices Incas. Comme c’est la période de noël, de nombreux habitants des villages voisins descendent en ville pour vendre plein de trucs sur le marché de noël et la place principale. Ils dorment dans les rues le soir et il y a beaucoup d’activités : des distributions de cadeaux, des spectacles de rue, des soupes/repas etc. L’ambiance est particulière avec des rues remplies de monde, pleins de pétards et de feux d’artifices qui sautent à toutes heures du jour et de la nuit (avec Camille, on est trop content et on en achète plein du coup), des gens qui vendent de tout et de n’importe quoi dans tous les sens, des Cholitas dans leurs plus beaux habits colorés avec des micro-llamas vivants dans les bras ou des plus gros llamas en laisse qui demandent à se faire prendre en photo en échange de quelques soles.

Souvent, il fait pas si beau à cusco à cette époque. Le ciel ensoleillé vire régulièrement au gris et à la pluie dans la même journée. Quand il pleut on essaye de se trouver un endroit sympa où se poser (et avoir Internet). On retrouve Myriam et Dom le samedi matin, le 24, et on se balade ensemble la journée. Le marché de Cusco, comme souvent les marchés au Pérou (et dans le reste de l’Amérique Latine ?) est super avec plein de chocolats (yeah) et de cafés, de jus de fruits, de “restaurants” (c’est plus des foodstalls à l’asiatique), de viandes, de légumes et fruits, de pains, d’herbes diverses, variées, étranges, médicinales ou magiques, de fleurs, d’artisanats etc. C’est un peu bordel très organisés en quartiers rassemblant ceux qui vendent le même type de choses. J’adore les marchés ici. On y mange les midis, parce que c’est pas cher, on y boit le jus de fruit du dessert, on y achète le chocolat et la coca qui, mélangée à la llicta (cendre d’arbres fruitiers), permet de combattre le mal d’altitude. Ca anésthésie la bouche aussi. Ca occupe. Il paraît que ça coupe la faim et la flemme. Ce qui est sûr c’est que quand j’en mâche trop souvent, ça a tendance à irriter la bouche. Mais C’est bien efficace en altitude.

On fête noël tous ensemble autour de bonnes bières. Au Pérou, ils se sont mis à faire des bières artisanales (j’ai cru comprendre que ça fait pas si longtemps) qui sont, pour certaines, vraiment pas mal. Et comme on aime ça, on s’applique à goûter sérieusement cette production locale. On s’offre des cadeaux, on fête le ptit Jésus, on rigole. Dom se fait voler son sac aussi à un moment. Joyeux Noël. Mais ça ne suffit pas à pourrir cette belle ambiance de retrouvailles générales. C’est quand même sympa de se revoir toutes et tous ici, de ce côté-ci du monde, au Pérou où aucun de nous n’était jamais allé. Le soir, Arthur, Camille et moi, on remonte à l’hostal où tout le monde fait la fête autour d’un gros repas et de pas mal de bouteilles. A partir de 23h30/minuit, on a l’impression que tous les habitants et habitantes de tous les quartiers de Cusco se mettent à faire péter des pétards de feux d’artifice. Il faut imaginer voir une ville de bonne taille face à soi et ne pas savoir où poser les yeux. De partout partent des fusées, petites, grandes, moyennes, blanches, jaunes, vertes, rouges, bleues, des qui foirent, des qui montent haut, des très bruyantes, des avec des formes de spermatozoïdes qui grimpent vers les nuages, des explosions fugaces. Et cela de partout en même temps et en décalé dans toute la ville. Et ça dure. Ca dure longtemps. C’est le plus beau feu d’artifice que j’ai jamais vu. C’est pas un truc organisé, centralisé, orchestré, monté et pensé. C’est presque une compétition entre quartiers, à qui aura le dernier mot, la dernière fusée. Pendant une heure, c’est très intense et l’air se charge d’une forte odeur de poudre, des nuages de fumées se forment en altitude. Mais ça continue jusqu’à bien après que l’on se soient couché.

 

Après noël, on décide de sortir de la ville, de trouver un endroit où se poser tranquillement, une petite ville ou un village. On décide donc d’aller à Pisac, un lieu que Mazzi m’avait recommandé. C’est un peu le Vilcabamba de Cusco, avec plein d’étrangers qui habitent là, qui font de la permaculture ou des bars, on peut y trouver au moins deux “Shaman Shops” où sont vendus de nombreux rapés ainsi que du San Pedro et autres ustensiles pouvant te reconnecter à la Pachamama, aligner tes chakras etc. C’est en plein de la vallée sacrée des Incas, une valles qui est bien longue, jalonnée par de nombreuses ruines et autres vestiges pré-colombiens, et descend jusqu’au Machu Pichu. On s’y trouve un hostal où on a des chambres sur la terasse avec une cuisine, un salon, une salle de bain. On est chez nous, nous dit, avec insistance, la logeuse. C’est là une petite bourgade tout ce qu’il y a de charmante, au pied d’un large complexe archéologique. On dirait que les Incas sont comme tous les empires : les soldats, les prêtres et les castes hautes en haut de la montagne, et le paysans et les classes laborieuses, en bas au travail. Alors forcément, nous, enfin Arthur, Camille et moi, on veut aller visiter ces tas de cailloux. Mais ça coûte super cher. C’est pas possible de payer juste pour un site, nous dit-on, il faut absolument prendre un billet, vachement plus cher, pour aller voir 150 sites en trois jours. Bien sûr c’est plus cher, mais vous pouvez voir 150 sites, en trois jours. Merveilleux. On essaye d’y aller en fraudant (pour faire honneur à la réputation des Français quand même), mais on se fait quand même refouler. Finalement on décide d’aller voir d’autres endroits, habités par des gens qui vivent encore (maigre consolation, certes). On part donc tous les cinq et on monte, on monte, on monte. Le chauffeur du taxi (oé on y va en taxi, y a pas de bus, ils font grève) n’aime que trois chansons qui passent donc en boucle (à l’aller comme au retour). La montagne est très belle, verte avec des beaux rochers. Bien sûr, il ne fait pas très beau mais on a tous (sauf Myriam) emmené de quoi se couvrir. Arrivé en haut, il y a une communauté autochtone et plusieurs lac. On se lance dans une petite balade qui se transforme en petite rando pluvieuse. Les paysages sont superbes. Mais c’est humide et frais. Un mélange de ce que j’imagine être l’Irlande, avec des montagnes à 4500m d’altitude. Pas mal du tout.

Ainsi va la vie à Pisac, tout doux. Des balades, des session d’acroyoga, des jus de fruits, des bières, des jeux. Au nouvel an, avec Camille on a prévu le coup, On achète un petit stock de pétards et de feux d’artifice pour faire honneur. On commence l’apéro, on continue l’apéro puis arrive bientôt l’heure fatidique (factice, occidentale, coloniale, imposée, fêtée, réjouissante etc) pour faire sauter tout notre arsenal. Mais en assez peu de temps on a fini autant nos provisions d’explosifs que d’alcool. On part donc avec Dom en expédition de réapprovisionnement. Le centre ville est rempli de vendeuses de pétards et de feux d’artifice (ouf ! tout n’est pas perdu !), de confettis et de fleurs avec pleins d’enfants, de jeunes et de moins jeunes qui courrent, s’excitent et s’extasient, dans le feu de la fête, les veines chargées d’énergie, d’adrénaline, de joie et, peut-être, d’autres substances. On fait un plein de poudres et d’alcool et on reviens bien vite à l’hostal devant lequel on cherche à attirer l’attention d’Arthur, de Camille et de Myriam pour leur faire une démonstration de notre nouvel arsenal. Comme ils ne daignent pas nous montrer leur doux visage, on décide quand même de faire sauter notre plus grosse munition. Un succès ! Une merveille qui fait trembler l’ensemble des vitres du quartier et fait partir l’alarme d’une voiture garée à proximité. Plus tard on ressort, on retourne acheter quelques pétards. On croise des policiers que j’arrive, entre les brumes piscolisées de mon cerveau, à convaincre de participer à notre petite fête pyromane. Finalement ils se laissent prendre au jeu et ils ont l’air de bien aimé. On arrive à un bar, tenu par un Italien, où de la cumbia jouera en live toute la nuit. Et s’ensuit un moment de danse effrénée jusqu’au petit matin. Au retour à l’hôtel, Arthur se rend compte qu’il a perdu la clef de la chambre. On fait le tour de l’étage puis ils repartent avec Camille sur nos pas. Après un long moment ils reviennent avec la clef qui se trouvait en fait dans la poche d’Arthur…

Et puis viennent les adieux. Enfin les au revoir. On s’embrasse, avec effusion, bien sûr. On se fait de nombreuses promesses de jours futurs meilleurs et bien-heureux (après tout, 2017 c’est bien l’année de la fête non ?), de se revoir en Equateur, en France, au Canada, ailleurs, qui sait ? Et puis on part pour Cusco avec Arthur et Camille. Les mouchoirs dégoulinant de larmes (ou est-ce autre chose ?) de Dom et Myriam s’agitent dans le vent tourbillonant derrière le mini-bus. A Cusco, on va à la gare des bus chercher un trajet pour Arequipa. Tout est plein, tout est cher. Rien ne part ce soir. Revenez demain. Finalement on trouve l’entreprise qui a le dernier bus avec de la place. Et on comprend pourquoi… Bienvenu sur la Universal ! L’entreprise qui peut rivaliser avec les trajets népalais et indiens ! Ici, les genous ne rentre pas sur les sièges. Ici, les informations concernant votre trajet seront retenu pour ne pas vous effrayer ! Finalement c’est juste long et inconfortable avec des arrêts et un changement de bus au petit matin. Ca crée des liens. Ma voisine étudie l’administration et retourne en cours à Arequipa. La mère de devant nous offre des goodies à base de maïs.

Plus on descend vers Arequipa, plus c’est sec. Et tout ce sable et toute cette sécheresse, ce sera comme ça jusqu’à Santiago, plusieurs milliers de kilomètres au Sud. Arequipa, c’est une oasis entre des montagnes et des volcans, secs, bien entendus. C’est une ville coloniale et industrielle gigantesque. Le centre ville est très beau. Des places italiennes, des arcades espagnols, de la nourriture et de la musique péruvienne et des bières locales d’inspirations américaines et belges. La belle vie. L’hostal lui-même a un charme rétro magnifique, avec des balcons et des cours internes, des grandes pièces hautes de plafonds et sa collection de machines à écrire. On passe nos journées à déambulait dans la ville, j’arrive à travailler un peu de temps en temps, on goûte les bières, on s’installe au marché (encore mieux que celui de Cusco), on joue à des jeux, on profite. Arequipa c’est une ville que j’ai bien aimé. Ses monastère et son couvent gigantesque, son marché qui fête son anniversaire en énorme farandole carnavalesque où les différents secteurs (commerciaux) du marchés lances des produits. Qui des bonbons, qui des fleurs, d’autres des patates, des os en plastique pour chiens, des fruits…

Et puis vient le temps de partir vers le Sud. Camille doit aller, assez rapidement, jusqu’à Coquimbo, au Chili, pour travailler une ultime fois sur ce continent. On prends un bus un matin jusqu’à Tacna, la frontière avec le Chili, on arrive l’après-midi, on traverse la frontière et on arrive le soir à Arica. On décide d’y rester la nuit avant de reprendre un bus de 24h pour Coquimbo. Arica, de nuit, c’est une ville frontière. De jour aussi d’ailleurs. Il y a probablement des aspects le fun dans cette ville, mais on l’a pas vu. On passe la nuit dans un très digne représentant des hôtels frontaliers, ces bouges immondes où tu ose pas trop dormir de peur d’attraper la peste et la lèpres après avoir était détroussé par les tenanciers véreux. Bien heureusement, rien de tout cela ne se passe, même si les draps étaient douteux et les propriétaires très probablement magouilleurs. C’est bizarre d’être de nouveau de retour au Chili. Bientôt Santiago je me dis. Avant on a 2500km à faire en bus et on va s’arrêter à Coquimbo, une ville portuaire que je ne connais pas… Il fait beau, il fait chaud, il fait sec.

PS : Certaines photos ont été prises par Arthur et Camille, mais je sais plus lesquelles… Qu’ils en soient remerciés !

 

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