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Pérou III : en route vers le nord

A Lima, même à 2h du matin quand j’arrive, il fait chaud et humide. Je descend de l’avion et je croise déjà des amis de Francisca qui viennent pour le festival de Chincha où ils vont jouer. Je voulais aller dans le même hostal qu’eux mais sur Internet il affichait complet. J’avais donc réserver un autre hostal. Le Point Hostal. C’est un “party hostal”. Le concept c’est une sorte d’auberge pas trop cher (mais pas trop bon marché non plus) avec pleins de dortoirs et un bar. Tous les soirs, il y a des activités plus où moins alcoolisées et vers 2h du matin, les gentils organisateurs de l’hostal emmènent la troupe de joyeux touristes, l’œil luisant et les joues rougies, dans différents clubs/bars/concerts de Lima. Bref, c’est pas le top pour se reposer, mais bon on peut y rencontrer du monde rigolo et en plus c’est à côté de là où logent mes amis chiliens.

Cette fois-ci, j’apprécie plus Lima. Je reste pas si longtemps mais je ne m’ennuie pas, je rencontre des gens, je vois Francisca et sa troupe de danseuses et j’arrive aussi à passer un peu de temps avec Amrta. Amrta, c’est un ami DJ que j’avais rencontré en Bolivie à un festival et que j’avais recroisé par hasard dans les rues de Cuenca. On se retrouve en ville pour se balader, boire des bières puis je rejoins Francisca et ses amis pour passer la soirée ensemble. Ils décident d’aller jouer dans la rue. Les musiciens sortent les tambours et les danseuses se mettent à danser. Le style est “afro-madingue”, c’est tout plein d’énergie et impressionnant. Les filles se relaient pour danser. Les musiciens jouent sans s’arrêter. C’est intéressant de voir ce groupe de chilien fascinés par la culture africaine, sa musique et sa danse. Ils en connaissent un paquet sans jamais y avoir mis les pieds. Le chapeau tourne pour financer leur voyage. Les badauds se joignent à la danse ou encouragent les artistes en frappant des mains. Ca met une belle ambiance sur la place de Barranco! Forcément, vu comme ça, Lima devient bien plus attrayant que tout seul à ne pas savoir qu’y faire. J’y passe quelques jours avant d’aller à Chincha rejoindre Francisca et son groupe de danse.

 

Chincha, c’est pas une jolie ville. Les bâtiments sont laids, les rues poussiéreuses. Il n’y a presque aucun attraits à cette ville. Elle est pas loin de la mer, mais elle n’est pas côtière non plus. Elle grouille de gens et d’odeurs par contre. C’est le cœur de la culture afro-péruvienne et il paraît que la cuisine y est particulièrement gastronomique. L’intérêt de cette région c’est donc sa culture, la fusion entre la culture afro, des descendants d’esclaves importés par les Espagnols, et la culture péruvienne. Cette année est la première édition du festival international de folklore de Chincha. Alors c’est vrai, d’habitude je suis pas un amoureux inconditionnel des festivals folklorique. Les bals trads en France, je suis pas un habitué enthousiaste. Mais là c’est chouette, y a de la couleur, des musiques différentes, les gens sont heureux, les danses variées… Et puis y a aussi mes amis du Chili qui sont là. C’est eux la grande (unique ?) raison de ma venue ici. Pour passer un peu plus de temps en leur joyeuse compagnie. Pour ce premier festival international de folklore de Chincha, des compagnies (de danse surtout) sont venues d’Argentine, du Chili, de tout le Pérou, d’Equateur, de Bolivie et présentent toutes différents types de danses. Le jour où j’arrive il y a un “pasa calle” : toutes les compagnies déambulent dans la villes et performants quelques morceaux choisis de leur art. J’accompagne donc le groupe de Francisca (Ensamble Estación) en faisant du soutien technique. En gros je film et j’apporte à boire au fur et à mesure. Les compliments pleuvent drus, les gens apprécient beaucoup l’afro maringue. Il faut dire que c’es tassez impressionant et très énergique comme type de danse. Ici – j’ai l’impression que c’est presque un trait commun en général en Amérique Latine – les gens s’interpellent par nationalité (ou, aussi, souvent, par caractéristiques physiques). Donc le long du pasa calle, les gens demandent d’où vient le groupe et encourage ensuite de grands “¡Vamos Chile!” ou “Gracias Chile” comme si chaque compagnie ici représentait leur pays d’origine, un peu comme dans une compétition sprotive.

Après le pasa calle, je fais partie de la troupe. Sans le vouloir, tous les membres me sont “très reconnaissants” parce que je les ai un peu aidé. Entre nous, j’ai vraiment pas l’impression d’avoir fait grand chose, mais bon. Du coup je commence à vraiment mieux connaître toute la troupe et c’est quand même une belle bande de personnes trop chouettes ! Le deuxième soir, ils me font venir dans le gymnase où se déroulent les spectacle. Assistant technique encore une fois : je fais partie de la troupe alors je paye pas l’entrée, personne ne pose de question, j’ai l’impression d’être un peu une fraude mais j’en profite quand même. Après les spectacles et le souper, vers 1h du matin, on s’embarque pour aller à une fête importante de la communauté afro-péruvienne de El Carmen. J’insiste sur le côté afro-péruvien parce qu’il paraît que c’est une célébration qui leur est bien particulière. On arrive donc en pleine nuit, il y a beaucoup de gens, il faut faire la queue pour rentrer. Tout le monde bois de la bière, on entend de la musique, des gens dansent entre les voitures garées. On paye l’entrée et on finit par réussir à se glisser dans l’enceinte où se déroule la fête, la Yunza negra de Mamaine. Tout le monde est sur son trente-et-un et je me sens un peu pouilleux avec ma chemise toute déchirée (elle s’est ouverte en deux dans le dos dans le taxi pour venir). Le principe de la fête : il faut faire venir quelques milliers de personnes, des groupes de musique, beaucoup de bières, une scène avec un bon équipement de son ; sur les quelques milliers de gens sur place, la moitié doit savoir bien dansé ; alcooliser tout le monde et avoir deux arbres assez grands avec plein de cadeaux accrochés dessus dans l’enceinte de la fête ; toute la nuit, à tout de rôle, les fêtards qui le souhaitent, donnent des coups de haches et de machette dans l’arbre jusqu’à ce que celui-ci tombe ; puis attaquer le suivant. Celui qui donne le coup de grâce du deuxième arbre doit, en théorie, organiser la yunza de l’année suivante. Donc, il faut imaginer plein de gens bien saoul, qui dansent sur de la musique live en buvant de la bière, une foule dense au milieu de laquelle, à un moment, on entend “cuidado cuidado” et bim, tombe un arbre. Surprennamment, il semble qu’il n’y ait pas de blessés ni de morts. Une sacrée fête, drôle d’expérience. Plusieurs personnes me grondent gentillement parce que je ne danse pas et me montre ensuite comment faire pour danser. Je suis pas sûr de retenir bien la leçon, mais c’est gentil de leur part.

 

J’avance à petits pas, le cœur pompe et pompe et pompe. La tête me tourne parfois, le sang tape fort dans mes tempes, bom bom bom. Les jambes fragiles, un pas devant l’autre dirait mon père. Mon ventre se contracte, fait des bulles, joue à la guerre civile. J’ai l’impression de comprendre et de vivre l’expression “être soumis à un stress”. Mon corps tout entier est soumis à un grand stress. Et ce crâne qui rétrécit et le sang qui tape. Bom bom bom. Un pas devant l’autre. Ca grimpe. La pluie vient et repart, le vent fouette, il fait froid. Les montagnes s’élancent vers le ciel mais se perdre bien vite dans les nuages et le brouillard. On apperçoit à peine les glaciers qui sont pourtant, paraît-il, fort nombreux. Il y a environ 600m de dénivellé à monter, tout droit, jusqu’au lac, on est entre 4000 et 4600m et je ressens vraiment les effets de l’altitude.

C’est le cœur lourd que je suis reparti de Chincha, ville si laide et poussiéreuse, mais où j’aurai passé un si bon moment. Intense et tout comme il faut avec sa chaleur, ses danses, ses amis… Direction Huaraz. Yoris m’avait dit que c’est une superbe région avec de belles montagnes. En plus j’allais y rejoindre Ramouche et Ombline, des amis de Montreux que je n’ai pas revu depuis longtemps. Les retrouvailles sont joyeuses : on se promène, on se raconte nos vies, on boit des canons, on se fait des apéros-tarots. De toutes façons, c’est la saison des pluies : il fait froid et il pleut tout le temps. On veut quand même visiter un peu la région alors on s’organise un petit tour vers la fameuse Laguna 69.

On part en bus à 5h du matin. Dans le bus une Américaine passe trois heures d’affilée à parler à sa voisine. Impressionant le débit de parole. Ramouche pense qu’elle voyage seule et a besoin de vider son sac sur la première âme venue. Je pense qu’il a raison. Petite pause à 7h et quelques pour boire un maté de coca et c’est reparti, à l’assaut de la montagne. Le temps ne se découvre pas mais le paysage reste grandiose. On passe dans une sorte de canyon étroit, le parois abrupte et on tombe sur un premier lac couleur turquoise. Le lac est bordé d’arbres particuliers : leur écorce ressemble à du papier rouge. Finalement le bus nous laisse au début du chemin qui monte et monte dans le vent et la pluie jusqu’à environ 4600m d’altitude. Arrivé en haut, après une belle montée où mon organisme s’est fait bien malmené par les effets de l’altitude, on découvre un autre lac turquoise, entouré d’éboulis et de falaises surmontées de glaciers qui se perdent dans les nuages. Au-dessus, entre les bancs de nuages, on devine des arrêtes aiguisées, des pentes vertigineuses. On attend une éclaircie, que les nuages se déchirent et nous offrent le paysage en entier. Mais ça n’arrive pas. Ca reste très beau. On pic nic et on repart. Le mal de crâne s’intensifie en descendant, c’est pas normal. Il pleut, il vente, il arrête de pleuvoir et ainsi de suite. Ramouche aussi à mal au crâne. Ca n’arrête pas. Finalement ça commence à s’estompant en arrivant dans la vallée. Au bout, une petite remontée et le mal de crâne revient et empire. Le soir, en rentrant à Huaraz, on se rend compte que malgré les nuages on a bien pris des couleurs. La fatigue, le soleil, le froid, tout cela a dû concourir pour ce mal de crâne lancinant. Une bonne nuit de sommeil et ça devrait passé.

Je ne sais pas trop où aller. Ramouche et Ombline repartent. C’était chouette de les voir, de passer du temps avec eux. Je ne vais pas rester à Huaraz, il fait trop froid et trop moche. Mais où aller. J’ai fini par accepté l’idée que mon terrain sud-américain est un échec. Je me concentrerai sur le terrain à Montréal et je dois essayer de profiter du reste du voyage tout en essayant d’avancer dans mon traitement de données, peut-être visiter d’autres communautés, si j’en trouve. Mais où aller ? Et pour y faire quoi ? Il y a des moments comme ça dans un long voyage. Des moments à vide. Des moments gris où on sait pas trop que faire. Je n’ai plus de buts et d’objectifs. Et je ne sais pas non plus de quoi j’ai envie. Finalement je décide d’essayer d’aller à Cajamarca et à son carnaval, réputé être le plus rigolo du Pérou. Ca commence mal, sur Internet, il n’y a aucun hôtel, hostal et autres auberges avec des chambres de libres. Je demande autour et les gens me disent que si j’ai pas déjà réservé de chambre, c’est mieux de pas y aller. Je décide d’essayer quand même, j’ai une tente après tout et ça me tente de voir ce carnaval. Par contre, à la gare de bus de Huaraz, on me prévient que tous les bus pour Cajamarca sont plens. Je prends un bus de nuit pour Trujillo en me disant que de là-bas je devrais bien trouver des bus. J’arrive au tout petit matin et non, tous les bus sont pleins. Je vais prends donc un autre bus pour Chiclayo. Myriame m’a dit que la ville avait un des meilleurs marchés de sorcière qu’elle ait vu au Pérou. Arrivé là-bas, je demande, par acquis de conscience et non, tous les bus pour Cajamarca sont pleins. Ca doit être une sacrée fête là-bas ! Donc je reste à Chiclayo. Après Huaraz, c’est un choc thermique ! Il fait très chaud. Très très chaud. C’est bien aussi ! Chiclayo, c’est pas une belle ville. Par contre c’est une ville très péruvienne et vraiment pas très touristique. En effet, son marché est vraiment grand et beau. Pleins de choses différentes, des vêtements, de la nourriture, des épiceries, des marchandises en tous genre et une grande partie “sorcière” et naturaliste. Je passe plusieurs heures à déambuler dans le marché, à l’explorer. Et puis je par à la recherche du fun, des bars. Je tombe sur un bar à bières de microbrasseries tenus par un couple amoureux de bières. Je passe la soirée à discuter et sympathiser avec les tenanciers. Le lendemain je vais visiter le musée du Seigneur de Sipan pour mieux découvrir l’histoire pré-Inca de la région. Ca a l’air d’avoir été une société bien hiérarchique avec beaucoup d’artisanat. Ils savaient faire du plaqué or et quand les Espagnols sont arrivés pour piller les richesses, ils ont dû être dégoûtés quand ils ont vus que c’était du toc !

Comme la montagne ne m’a pas trop réussi, entre le mauvais temps, le froid et, pour Cajamarca, les difficultés d’accès, je décide d’aller à la plage me poser une bonne semaine à glander et me remettre à bosser avant de retourner en Equateur. Je prends donc la direction de Mancora. Mancora, c’est une station balnéaire très touristique, autant d’un point de vue national qu’international. Mais j’arrive juste après la haute saison et, si Mancora n’est pas vide, c’est pas non plus la folie. J’arrive très tôt, juste au moment où le soleil commence à pointer le bout de son nez au-dessus de l’horizon. C’est le moment où les derniers fêtards s’attardent pour un dernier verre, déblatèrent leurs dernières conneries. C’est rigolo le contraste. Je me trouve une auberge sympathique, tenue par un Péruvien d’origine japonaise qui a pas mal bourlingué et qui est rigolo, bien qu’un peu “adolescent” à certains moments. Et c’est le début d’une dizaine de jours de fénéantise et de glande. Franchement, c’est pas mal. Je vais d’une plage à l’autre, je lis beaucoup, je fais des transcriptions. Il y a quelques Argentins dans l’hostal avec qui on boit des bières en jouant aux cartes. Je deviens presque un expert du Truco, un jeu où il faut mentir, voire tricher. Sato, le propriétaire de l’hostal, m’emmène en moto voir d’autres plages, manger dans des endroits pas touristiques. Pas loin de Mancora, il y a un lieu, El Ñuro, où il y a plein de tortues de mer. Donc je vais y voir. C’est presque émtionnel comme expérience de voir des tortues de mer. Par contre le setting fait un peu zoo, j’apprécie moins. Et donc la vie coule toute tranquille à Mancora, je lézarde entre la chaleur écrasante et les moustiques, les petites fêtes et un peu de travail, les promenades et les plages. Et puis au bout d’un moment, il est tant de repartir et je prends un bus, direction Equateur. Je découvre alors l’arrière-pays de Mancora, un arrière pays étonnant fait de collines sculptées par l’érosion, vertes, très vertes. Normalement c’est jaune sableux. Mais il pleut tout les soirs. Il paraît que c’est pas normal. Il y a aussi pleins de pompes qui pompent du pétrole hors du sol. Je pensais que ce serait plus apocalyptique que ça des champs de pétrole. Là, c’est presque mignon. Cela dit, il pleut tellement que mon trajet jusqu’à Loja se transforme en une espèce d’aventure…

De Mancora, je dois aller à Sullana où je dois prendre une correspondance pour la frontière puis Loja. Je n’arrive pas à savoir à quelle heure est ma correspondance, mais le trajet jusqu’à Sullana doit prendre 2h. Mais il pleut. Et puis à un moment on est arrêté. Des gens sur le bord de la route regarde le bus arriver en rigolant et en criant “Tu ne passeras pas tonton !”. Je ne comprends pas de quoi ils parlent. Et puis j’arrive à avoir une petite vue sur ce qui nous attend… Une rivière en crue, une extension de lac, un bout de mer. Mais, sans se démonter, le chauffeur fonce dans l’eau. Il y a bien un mètre cinquante de profondeur. Les passants sur le bord de la route explosent de rire et conseillent au passagers du premier étage de bien fermer leurs fenêtre. Le bus tangue, vascille, s’enfonce mais finit par ressortir. En bas, c’est la crue dans le bus. Mais à l’étage on est bien au sec. Cela dit, les roues ont pris cher et les gardes boues encore plus et bloquent les roues. On passe du temps à réparer. Il recommence à pleuvoir. J’ai l’impression que la route jusqu’à Sullana n’est qu’une longue et sinueuse rivière, des étangs et des marais. La saison des pluies, si inhabituelle ici apparemment, touche lourdement l’arrière pays. A Sullana, on me dit que mon bus est déjà parti depuis un bout de temps. Je cherche une solution et finalement j’apprends que mon bus n’est même pas encore arrivé ici et que je n’ai rien manqué du tout. Finalement il arrive et je monte dedans, je m’endors rapidement. A la frontière tout va très vite. Je rencontre un vieil Allemand bien allumé qui va aussi, bien sûr, à Vilcabamba et me propose de faire route ensemble une fois à Loja. A la frontière on apprend que la route vers Loja est coupée et qu’il faut attendre le matin pour repartir. On s’installe pour passer une mauvaise nuit dans le bus garé au chaud. Finalement au bout d’une bonne heure le chauffeur nous annonce qu’ils ont trouvé du pétrole et qu’on peut repartir par une autre route. On arrive finalement à Loja en milieu de matinée. Et, comme prévu, on fait le voyage ensemble avec Kayser, l’Allemand du bus, jusqu’à Vilcabamba. Il commence à me dire qu’il prie tous les jours pour Jésus, mais qu’il n’est pas religieux. Que les religions sont des fraudes qui pervertissent la vraie parole du fils de Dieu, fidèlement retranscrite dans la Bible, bien sûr. Je suis vraiment content d’enfin arriver à Vilcabamba et de me débarasser de ce gentil mais encombrant bonhomme aux discours tordus auxquels je ne peux adhérer. De retour en Equateur, à Vilcabamba. Je suis content de repasser ici, comme une boucle bouclée et le voyage qui semble déjà s’estomper…

Chile, le retour

Le nord du Chili, quand on descend en bus en direction de Santiago, c’est… sableux. Du désert, du désert encore du désert. Et puis en bus ça dure bien 25 heures d’aller de Arica à Coquimbo. Comme le Chili c’est ben plus cher que le Pérou, on ne prend pas le bus super confortable qu’on aurait pu prendre, mais comme au Chili même les bus un peu moins chers sont correct, c’est pas pire (on s’habitue au luxe des transports, en effet). Donc on part d’Arica en fin de journée. De nuit, traverser le désert, c’est pas mal parce que, de toutes les façons, y a pas grand chose à voir. Par contre, c’est bizarre parce que vers 1h du matin, quand tu commence à être bien pris dans ton sommeil, le bus s’arrête et traverse une sorte de douane fixe au milieu de nulle part. Pourtant, si je me souviens bien de la carte chilienne, entre Arica et Coquimbo, on est pas censé passer de frontières. Du coup, les bus s’arrêtent au milieu de la nuit, tout le monde descend, on passe les sacs au rayon X et on repart, sans vraiment plus d’explications. Le reste du voyage, vous l’aurez compris, n’est pas palpitant, le paysage défile, monotone et un peu triste. Je suis pas amoureux du désert.

Coquimbo, par contre, c’est une jolie ville. C’est un port commercial et il y a donc un bordel par rue, des machines à sous et des vieux rades. Y a aussi une rue un peu touristique avec des bars et restaurants. Il y a pas foule dans la ville, c’est bizarre. Les maisons montent à l’assaut d’une butte qui forme la colonne vertebrale de la péninsule sur laquelle se situe la ville. Au bout de la péninsule ,des amas de roches se jettent dans la mer. On loge dans un hôtel pas trop cher et très retro dans le centre. Le matin on va aider Camille, Thibault et Pamela à faire le montage du spectacle pour le soir. Enfin “on”, surtout Arthur les aide, moi je sais pas trop quoi faire alors je regarde surtout. Puis, au bout d’un moment, on se lasse et on les laisse pour aller se promener dans les rochers au bout. Un chien tombe en amour avec nous et nous suit partout, grimpe aux rochers et pleure quand il n’arrive pas à nous rejoindre. On reste ainsi quelques nuits puis on laisse Camille à son travail et on décide de partir à Santiago avec Arthur, retrouver l’autre Arthur. On essaye de faire du stop sur la Panaméricaine. On attend, il fait chaud, y a du soleil. On essaye de garder la bonne humeur. Je pense que c’est pour ça que j’aime pas trop le stop : quand personne ne s’arrête, j’ai tendance à les trouver tous trop cons et ça m’énerve. Mais on persiste une bonne heure et demie puis on abandonne, peut-être un peu vite mais voir des centaines de voitures, camions et autres passer devant sans s’arrêter, c’est désespérant. Finalement on prends un bus.

A Santiago, je passe deux jours avec Arthur, je retrouve des amies d’avant, on fait la fête un peu (enfin, on boit beaucoup de Pisco chilien) puis je vais chez Isaac qui habite dans la fameuse Comunidad Ecologica de Peñalolén. Ca me permet de passer du temps avec lui et de visiter cette fameuse communauté. Alors c’est un peu en hauteur, sur les marges de Santiago vers la Cordillère. C’est très vert, les habitants font un effort pour conserver la flore et la faune endémique. On est un peu au-dessus de la ville et de sa pollution. Par contre, pour aller au centre, c’est pas mal loin. Mais la maison est faite en adobe avec goût. La communauté elle-même n’a de communauté que le nom : c’est pleins de portails partout, avec des gardes à l’entrée, une zone commerciale “éthique, bio et gourmet”. Le paradis du bourgeois en 4×4 qui veut vivre dans son bel écrin vert avec une bonne conscience “alternative” : “je vis un peu en décalé, c’est si chic”. C’est assez surprenant cette évolution quand on sait que ça a commencé comme une communauté de hippies socialistes dans les années 1980 et que, par affinité, ça s’est agrandi avec des artistes. Ces nouveaux arrivants sont devenus connus, ont fait venir leurs amis. Et petit à petit c’est devenu une sorte de gated-community bio-écolo.

Je passe des jours sympathiques là-haut quand même, c’est assez confortable. Arthur et Camille me rejoignent chez Isaac. Sylvia, une amie chilienne, vient aussi une journée et on monte à la Quebrada de Macul. C’est une gorge, à portée de pieds de Peñalolén. C’est dans la montagne avec pleins d’arbres et une rivière très belle et fraîche. Il y a du monde qui monte ici, surtout l’été : c’est facile d’accès à la journée et c’est beau. Par contre, c’est un peu crade. Les gens qui viennent laissent tous leurs ordures accrochés dans des sacs plastiques dans les arbres. Un peu en mode “on a tout laissé en ordre derrière nous”. C’est dommage, surtout qu’il y a des panneaux demandant au gens de redescendre leurs déchets un peu partout. Cela dit, on passe une belle journée au soleil (qui tape fort) et dans l’eau (qui rafraîchit). Et puis le soir, c’est le désastre. C’est peut-être un trop plein de soleil, une surdose de vitamine D, ou autre chose, mais je me retrouve malade comme un chien, toute la nuit et les jours suivants. Finalement, je finis par me ressaisir mais reste faible encore un petit bout.

A Santiago, l’été, il y a vraiment pas mal de choses qui se passent. Le weekend du 20 au 22 janvier, par exemple, il y a la Fiesta del Roto Chileno dans le Barrio Yungai. C’est la première fête populaire où je suis allé au Chili la première fois que j’étais venu et que je parlais pas encore espagnol. En 4 ans, ça a bien changé, c’est devenu une grosse fête dans plusieurs rues avec des concerts, de la cueca, du cirque (Pame et Thibault y jouent). Je retrouve des amis que j’avais pas encore vu, qui joue ici, ou qui habitent à côté. Les amis on un peu changé mais pas trop. Y en a une enceinte jusqu’au yeux, un autre en couple, d’autres qui ont changé de style, mais ils sont toujours ben cool. On passe une belle soirée de retrouvailles et de festivité.

Après Santiago et sa communauté écologique de Peñalolén, je voulais aller à Pilen vers Cauquenes, retrouver des amis chiliens que j’avais rencontré en Bolivie et qui on monté une communauté. Mais, en fait, cet été, le Chili brûle, et il brûle bien. Des décennies de politiques agro-forestières industrielles au profit de grandes entreprises internationales qui font pousser de manière intensive et extensive des eucalyptus et des pins ont complètement asséché tout le centre du pays et dès que ça brûle, ça s’arrête pas facilement. Il y a des enquêtes pour savoir si c’est des incendies volontaires ou non mais, en tous cas, c’est catastrophique. Pilen, c’est au milieu de la zone des incendies. Mes amis me disent que leur maison n’a pas brûlé, mais ils ont été évacués à plusieurs reprise, ça brûle tout autour. Je décide donc de pas y aller et je rejoins Arthur et Camille au Sud, dans la région de Panguipulli, à un endroit où j’étais déjà allé avec Larissa et Amanda il y a 4 ans. C’est une belle région de lacs, rivières et termes. Il y a beaucoup de tourisme chilien qui viennent par ici chercher du vert et du frais. On passe une petite semaine à se baigner, camper, boire du rouge et des bières, faire des barbeuc, infuser dans des sources d’eaux chaudes… Des vacances bien sympathiques. L’autre Arthur aussi nous rejoint dans son voyage pour le sud. On se déplace en stop, ça marche mieux qu’à Coquimbo. Les gens ont pas mal de pickups par ici, donc on a toujours une belle vue et un peu d’air frais pour nos déplacement, c’est pas mal ! Presque, ça réconcilie avec les pickups (enfin presque).

On retourne à Santiago quelques jours avant le départ d’Arthur et Camille. Ils sont par ici depuis le mois de septembre alors c’est un peu un grand départ pour eux. Je vais loger chez Sylvia quelques jours et j’essaye de les voir souvent avant qu’ils ne partent. Et le jour fatidique arrive et les adieux sont déchirants. Je m’étais bien habitué à les voir au quotidien, à rigoler et se balader avec eux. Du coup je suis un peu désemparé. Mais je me ressaisi et pour pas sombrer dans l’immobilisme, je décide de filer vers Valparaiso, à Villa Alemana, très précisément, pour rejoindre des amis qui habitent là-bas. Ca fait longtemps que je les ai pas vu. J’arrive chez Rhon, on se promène, on retrouve Pancho et Cathy (encore des gens en attente de bébés…), on rigole bien. Le lendemain on monte dans les collines avec Rhon pour installer le matos. Rhon organisait une grosse fête de psytrance pour lever des fonds pour les victimes des incendies. Déjà en chemin pour monter tout là-haut, on traverse des bouts de collines et de forêts toutes brûlées. C’est beau et triste à la fois. On installe le son, on lance un barbeuc, on boit des bières et on commence la fête. Ca dure jusqu’au lendemain à 13h : il y a beaucoup de DJs qui ont voulu venir jouer gratuitement pour l’événement. Le lendemain on redescent dans la ville et je pars à La Calera passer quelques jours chez Pancho. La Calera, c’est pas beau et y a pas grand chose à faire, mais ça fait du bien de retrouver mon ami et de passer du temps avec lui.

Il me reste plus tant de temps que ça au Chili, je repars le 14 février (oui, les billets d’avion sont moins chers le soir de la Saint Valentin) et je veux encore aller à Valparaiso (la ville même) pour visiter un projet dont Arthur et Camille m’ont parlé puis retourner quelques jours à Santiago voir quelques amis avant de partir pour Lima. Donc je quitte La Calera et je vais à la Bio-Escuela de Valparaiso. C’est un projet qui est encore au début mais le but est de créer un centre communautaire, insérer dans le quartier pour promouvoir l’agriculture urbaine, les infrastructures écologiques etc. L’ambiance est vraiment chouette, les gens doivent un peu faire leur vie et s’insérer comme ils veulent/peuvent dans le projet. Il faut bosser un peu en échange du logement et de la bouffe mais c’est un peu comme on veut. Finalement j’aide à reconstruire un four à pain en argile et je passe l’après-midi les pieds dans la boue. Par contre, au final, à par le couple très impliqué à la base du projet, la plupart des gens ne font pas grand chose pour aider, c’est un peu bizarre.

Et puis c’est le retour à Santiago pour les derniers jours. Je retrouve des amis. Comme je pars bientôt, mes journées sont chargées, contrairement aux derniers moments où j’étais à Santiago où je ne faisais pas grand chose. Je passe du temps avec Sylvia, Paloma, Maud, Thibault et Pame qui me logent, je rencontre de nouvelles personnes… Bref le départ arrive à grands pas et finalement je me retrouve dans l’avion pour Lima avant d’avoir eu le temps de dire “ouf”. Je suis triste de partir. Je pense que c’est l’aspect qui me fatigue le plus dans le voyage : toujours devoir dire au revoir, et repartir vers le plus ou moins inconnu. Cela dit, heureusement, une amie chilienne part aussi à Lima le même jour donc je vais pouvoir passer du temps avec elle là-bas. Et c’est reparti dans le voyage…

Pérou (II) : “Feliz retrouvailles”

La deuxième partie de mon (premier) passage au Pérou peut être résumée par cette heureuse expression de Myriam : ce furent de fort joyeuses retrouvailles !

On s’est tout d’abord retrouvé avec Arthur et Camille dans un hostal qu’un ami de Quito m’avait recommandé. C’est l’hostal le moins cher de mon voyage pour l’instant. C’est très très roots. Je commence dans un “dortoir” : une chambre de trois lits où on dort à 4, il n’y a pas du tout de place pour mettre les affaires. Mes camarades de chambre sont des viajeros, ces gens qui voyagent et “ne sont pas des touristes” comme il y en a tant en Amérique du Sud. Il y a deux Colombiens et une Chilienne et ils voyagent en faisant de la musique, du jonglage ou en vendant des babioles dans la rue. Ils sont très sympa, mais prennent beaucoup d’espace et ne comprennent pas que je n’ai pas forcément envie de vivre comme eux, de faire comme eux, de fumer comme eux ou d’écouter la même musique que eux. En deux nuits, ils me saoulent tellement, que je décide de me barrer en tente dans la cours/jardin de l’hostal. L’hostal lui-même est très basique mais ceux qui s’en occupe (un mec, son cousin, un de ces potes et plus ou moins une voyageuse qui loge ici la moitié de l’année) sont très sympas et attentionnés. Cela dit ça manque d’eau chaude et d’un peu de propreté (je deviens tatillon…).

Cusco est une ville dans une vallée évasée et les bords de la ville remontent sur les pentes des colines. Ces (beaux) quartiers ne sont souvent accessible qu’à pied. C’est ainsi que pour monter à l’Aguaymanto, notre hostal, il fallait d’abord monter environ 300 marches (Camille les a comptées, si si) a 3500m d’altitude. Autant dire, que quand on descend en ville se promener, on s’amuse pas à faire des allers-retours. Il paraît qu’à Cusco, plus tu monte, plus les hostal sont bon marchés (sans mauvais jeux de mots). Et en récompense de tes efforts d’avare, tu peux jouir d’une super vue sur l’ensemble de la ville. C’est une belle ville, avec un centre historique colonial bien préservé, construit sur les ruines (partiellement apparentes) des bâtiments et édifices Incas. Comme c’est la période de noël, de nombreux habitants des villages voisins descendent en ville pour vendre plein de trucs sur le marché de noël et la place principale. Ils dorment dans les rues le soir et il y a beaucoup d’activités : des distributions de cadeaux, des spectacles de rue, des soupes/repas etc. L’ambiance est particulière avec des rues remplies de monde, pleins de pétards et de feux d’artifices qui sautent à toutes heures du jour et de la nuit (avec Camille, on est trop content et on en achète plein du coup), des gens qui vendent de tout et de n’importe quoi dans tous les sens, des Cholitas dans leurs plus beaux habits colorés avec des micro-llamas vivants dans les bras ou des plus gros llamas en laisse qui demandent à se faire prendre en photo en échange de quelques soles.

Souvent, il fait pas si beau à cusco à cette époque. Le ciel ensoleillé vire régulièrement au gris et à la pluie dans la même journée. Quand il pleut on essaye de se trouver un endroit sympa où se poser (et avoir Internet). On retrouve Myriam et Dom le samedi matin, le 24, et on se balade ensemble la journée. Le marché de Cusco, comme souvent les marchés au Pérou (et dans le reste de l’Amérique Latine ?) est super avec plein de chocolats (yeah) et de cafés, de jus de fruits, de “restaurants” (c’est plus des foodstalls à l’asiatique), de viandes, de légumes et fruits, de pains, d’herbes diverses, variées, étranges, médicinales ou magiques, de fleurs, d’artisanats etc. C’est un peu bordel très organisés en quartiers rassemblant ceux qui vendent le même type de choses. J’adore les marchés ici. On y mange les midis, parce que c’est pas cher, on y boit le jus de fruit du dessert, on y achète le chocolat et la coca qui, mélangée à la llicta (cendre d’arbres fruitiers), permet de combattre le mal d’altitude. Ca anésthésie la bouche aussi. Ca occupe. Il paraît que ça coupe la faim et la flemme. Ce qui est sûr c’est que quand j’en mâche trop souvent, ça a tendance à irriter la bouche. Mais C’est bien efficace en altitude.

On fête noël tous ensemble autour de bonnes bières. Au Pérou, ils se sont mis à faire des bières artisanales (j’ai cru comprendre que ça fait pas si longtemps) qui sont, pour certaines, vraiment pas mal. Et comme on aime ça, on s’applique à goûter sérieusement cette production locale. On s’offre des cadeaux, on fête le ptit Jésus, on rigole. Dom se fait voler son sac aussi à un moment. Joyeux Noël. Mais ça ne suffit pas à pourrir cette belle ambiance de retrouvailles générales. C’est quand même sympa de se revoir toutes et tous ici, de ce côté-ci du monde, au Pérou où aucun de nous n’était jamais allé. Le soir, Arthur, Camille et moi, on remonte à l’hostal où tout le monde fait la fête autour d’un gros repas et de pas mal de bouteilles. A partir de 23h30/minuit, on a l’impression que tous les habitants et habitantes de tous les quartiers de Cusco se mettent à faire péter des pétards de feux d’artifice. Il faut imaginer voir une ville de bonne taille face à soi et ne pas savoir où poser les yeux. De partout partent des fusées, petites, grandes, moyennes, blanches, jaunes, vertes, rouges, bleues, des qui foirent, des qui montent haut, des très bruyantes, des avec des formes de spermatozoïdes qui grimpent vers les nuages, des explosions fugaces. Et cela de partout en même temps et en décalé dans toute la ville. Et ça dure. Ca dure longtemps. C’est le plus beau feu d’artifice que j’ai jamais vu. C’est pas un truc organisé, centralisé, orchestré, monté et pensé. C’est presque une compétition entre quartiers, à qui aura le dernier mot, la dernière fusée. Pendant une heure, c’est très intense et l’air se charge d’une forte odeur de poudre, des nuages de fumées se forment en altitude. Mais ça continue jusqu’à bien après que l’on se soient couché.

 

Après noël, on décide de sortir de la ville, de trouver un endroit où se poser tranquillement, une petite ville ou un village. On décide donc d’aller à Pisac, un lieu que Mazzi m’avait recommandé. C’est un peu le Vilcabamba de Cusco, avec plein d’étrangers qui habitent là, qui font de la permaculture ou des bars, on peut y trouver au moins deux “Shaman Shops” où sont vendus de nombreux rapés ainsi que du San Pedro et autres ustensiles pouvant te reconnecter à la Pachamama, aligner tes chakras etc. C’est en plein de la vallée sacrée des Incas, une valles qui est bien longue, jalonnée par de nombreuses ruines et autres vestiges pré-colombiens, et descend jusqu’au Machu Pichu. On s’y trouve un hostal où on a des chambres sur la terasse avec une cuisine, un salon, une salle de bain. On est chez nous, nous dit, avec insistance, la logeuse. C’est là une petite bourgade tout ce qu’il y a de charmante, au pied d’un large complexe archéologique. On dirait que les Incas sont comme tous les empires : les soldats, les prêtres et les castes hautes en haut de la montagne, et le paysans et les classes laborieuses, en bas au travail. Alors forcément, nous, enfin Arthur, Camille et moi, on veut aller visiter ces tas de cailloux. Mais ça coûte super cher. C’est pas possible de payer juste pour un site, nous dit-on, il faut absolument prendre un billet, vachement plus cher, pour aller voir 150 sites en trois jours. Bien sûr c’est plus cher, mais vous pouvez voir 150 sites, en trois jours. Merveilleux. On essaye d’y aller en fraudant (pour faire honneur à la réputation des Français quand même), mais on se fait quand même refouler. Finalement on décide d’aller voir d’autres endroits, habités par des gens qui vivent encore (maigre consolation, certes). On part donc tous les cinq et on monte, on monte, on monte. Le chauffeur du taxi (oé on y va en taxi, y a pas de bus, ils font grève) n’aime que trois chansons qui passent donc en boucle (à l’aller comme au retour). La montagne est très belle, verte avec des beaux rochers. Bien sûr, il ne fait pas très beau mais on a tous (sauf Myriam) emmené de quoi se couvrir. Arrivé en haut, il y a une communauté autochtone et plusieurs lac. On se lance dans une petite balade qui se transforme en petite rando pluvieuse. Les paysages sont superbes. Mais c’est humide et frais. Un mélange de ce que j’imagine être l’Irlande, avec des montagnes à 4500m d’altitude. Pas mal du tout.

Ainsi va la vie à Pisac, tout doux. Des balades, des session d’acroyoga, des jus de fruits, des bières, des jeux. Au nouvel an, avec Camille on a prévu le coup, On achète un petit stock de pétards et de feux d’artifice pour faire honneur. On commence l’apéro, on continue l’apéro puis arrive bientôt l’heure fatidique (factice, occidentale, coloniale, imposée, fêtée, réjouissante etc) pour faire sauter tout notre arsenal. Mais en assez peu de temps on a fini autant nos provisions d’explosifs que d’alcool. On part donc avec Dom en expédition de réapprovisionnement. Le centre ville est rempli de vendeuses de pétards et de feux d’artifice (ouf ! tout n’est pas perdu !), de confettis et de fleurs avec pleins d’enfants, de jeunes et de moins jeunes qui courrent, s’excitent et s’extasient, dans le feu de la fête, les veines chargées d’énergie, d’adrénaline, de joie et, peut-être, d’autres substances. On fait un plein de poudres et d’alcool et on reviens bien vite à l’hostal devant lequel on cherche à attirer l’attention d’Arthur, de Camille et de Myriam pour leur faire une démonstration de notre nouvel arsenal. Comme ils ne daignent pas nous montrer leur doux visage, on décide quand même de faire sauter notre plus grosse munition. Un succès ! Une merveille qui fait trembler l’ensemble des vitres du quartier et fait partir l’alarme d’une voiture garée à proximité. Plus tard on ressort, on retourne acheter quelques pétards. On croise des policiers que j’arrive, entre les brumes piscolisées de mon cerveau, à convaincre de participer à notre petite fête pyromane. Finalement ils se laissent prendre au jeu et ils ont l’air de bien aimé. On arrive à un bar, tenu par un Italien, où de la cumbia jouera en live toute la nuit. Et s’ensuit un moment de danse effrénée jusqu’au petit matin. Au retour à l’hôtel, Arthur se rend compte qu’il a perdu la clef de la chambre. On fait le tour de l’étage puis ils repartent avec Camille sur nos pas. Après un long moment ils reviennent avec la clef qui se trouvait en fait dans la poche d’Arthur…

Et puis viennent les adieux. Enfin les au revoir. On s’embrasse, avec effusion, bien sûr. On se fait de nombreuses promesses de jours futurs meilleurs et bien-heureux (après tout, 2017 c’est bien l’année de la fête non ?), de se revoir en Equateur, en France, au Canada, ailleurs, qui sait ? Et puis on part pour Cusco avec Arthur et Camille. Les mouchoirs dégoulinant de larmes (ou est-ce autre chose ?) de Dom et Myriam s’agitent dans le vent tourbillonant derrière le mini-bus. A Cusco, on va à la gare des bus chercher un trajet pour Arequipa. Tout est plein, tout est cher. Rien ne part ce soir. Revenez demain. Finalement on trouve l’entreprise qui a le dernier bus avec de la place. Et on comprend pourquoi… Bienvenu sur la Universal ! L’entreprise qui peut rivaliser avec les trajets népalais et indiens ! Ici, les genous ne rentre pas sur les sièges. Ici, les informations concernant votre trajet seront retenu pour ne pas vous effrayer ! Finalement c’est juste long et inconfortable avec des arrêts et un changement de bus au petit matin. Ca crée des liens. Ma voisine étudie l’administration et retourne en cours à Arequipa. La mère de devant nous offre des goodies à base de maïs.

Plus on descend vers Arequipa, plus c’est sec. Et tout ce sable et toute cette sécheresse, ce sera comme ça jusqu’à Santiago, plusieurs milliers de kilomètres au Sud. Arequipa, c’est une oasis entre des montagnes et des volcans, secs, bien entendus. C’est une ville coloniale et industrielle gigantesque. Le centre ville est très beau. Des places italiennes, des arcades espagnols, de la nourriture et de la musique péruvienne et des bières locales d’inspirations américaines et belges. La belle vie. L’hostal lui-même a un charme rétro magnifique, avec des balcons et des cours internes, des grandes pièces hautes de plafonds et sa collection de machines à écrire. On passe nos journées à déambulait dans la ville, j’arrive à travailler un peu de temps en temps, on goûte les bières, on s’installe au marché (encore mieux que celui de Cusco), on joue à des jeux, on profite. Arequipa c’est une ville que j’ai bien aimé. Ses monastère et son couvent gigantesque, son marché qui fête son anniversaire en énorme farandole carnavalesque où les différents secteurs (commerciaux) du marchés lances des produits. Qui des bonbons, qui des fleurs, d’autres des patates, des os en plastique pour chiens, des fruits…

Et puis vient le temps de partir vers le Sud. Camille doit aller, assez rapidement, jusqu’à Coquimbo, au Chili, pour travailler une ultime fois sur ce continent. On prends un bus un matin jusqu’à Tacna, la frontière avec le Chili, on arrive l’après-midi, on traverse la frontière et on arrive le soir à Arica. On décide d’y rester la nuit avant de reprendre un bus de 24h pour Coquimbo. Arica, de nuit, c’est une ville frontière. De jour aussi d’ailleurs. Il y a probablement des aspects le fun dans cette ville, mais on l’a pas vu. On passe la nuit dans un très digne représentant des hôtels frontaliers, ces bouges immondes où tu ose pas trop dormir de peur d’attraper la peste et la lèpres après avoir était détroussé par les tenanciers véreux. Bien heureusement, rien de tout cela ne se passe, même si les draps étaient douteux et les propriétaires très probablement magouilleurs. C’est bizarre d’être de nouveau de retour au Chili. Bientôt Santiago je me dis. Avant on a 2500km à faire en bus et on va s’arrêter à Coquimbo, une ville portuaire que je ne connais pas… Il fait beau, il fait chaud, il fait sec.

PS : Certaines photos ont été prises par Arthur et Camille, mais je sais plus lesquelles… Qu’ils en soient remerciés !

 

Pérou (I) : mer, villes, reprise du voyage

Voilà un mois que je n’ai rien mis sur le blog mais j’ai été occupé et la lenteur des connexions rencontrées m’ont découragées. Bref que d’excuse.

Voilà presque un mois je partais de Chambalabamba, un petit pincement au cœur. Même si ce n’est pas ce que je cherchais pour ma thèse, j’ai rencontré des gens forts sympathiques, je me suis remis à jouer (pour un court moment, certes) à la batterie, je me baignais dans des rivières et nageais dans des déluges diluviens (de pluie). Bref, c’était le retour de la fameuse “easy life”, celle de la sédentarisation (temporaire), des bons amis et d’une vie qui s’écoule paisiblement, bien rythmé avec des surprises prévisibles et enchanteresses. Mais il était temps de repartir à l’aventure (youhou) et d’aller retrouver le Nart, Camille et Dom et Myriam pour passer une joyeuse fête du ptit Jésus et le renouvellement du calendrier grégorien (paix à son âme).

J’ai donc pris un bus de nuit pour traverser subrepticement et légalement la frontière péruvienne. Tu y arrive vers 3h du matin, il y a un pont, comme dans un bon James Bond, tu te fais tamponner le papier d’un côté puis tu traverse à pied, serrant les fesses, entouré de chiens hurlants et de militaires à moitié endormis pour arriver sur le sol péruvien à faire retamponner tes papiers et être un voyageur légal. Puis c’est reparti et on arrive le matin à Piura. Et Piura c’est pas joli, enfin ce que j’en ai vu mais j’avais pas l’intention d’y rester. Cela dit, il y a un petit côté Asie du Sud (-Est) que je retrouverai un peu partout au Pérou et qui n’était pas là en Equateur. Il y a plein de petites voitures un peu déglinguées, des rikshaw-moto et du monde dans tous les sens même le matin. Mais je prends directement un bus pour Trujillo : je veux aller voir la mer. C’est 7h de bus, 7h de désert. En fait je crois (mais peut-être que je me trompe) que la côté pacifique sud-américaine, de vers Santiago au Chili jusqu’à la moitié de l’Equateur c’est pas mal que du sable et du désert. Finalement j’arrive à Trujillo après pas mal d’heures de voyage dans différents véhicules de différentes tailles et formes. De là, je me trouve un petit taxi pour filer directement à Huanchaco, à 20 km de là.

Huanchaco, c’est une petite bourgade de surfers sur le bord de l’océan. C’est sec, y a pas beaucoup d’arbres. Mais la mer a des vagues très belles et grandes et roulantes. Alors, je fais pas de surf, mais j’ai toujours aimé jouer dans les vagues. J’arrive, je salut l’océan en m’y plongeant dedans (drôle de salut, en vérité…) puis je vais me trouver un camping. Une fois installé, je pars visiter la petite ville, son front de mer, ses bars et ses plages. C’est le lieu des couchés de soleil cartes postales. Dans un bar/hostal je rencontre un couple d’anglais qui voyagent depuis un an. Ils sont super rigolo : lui ressemble à un faune, dans sa manière d’être à toujours rigoler, danser et s’abreuver, et elle n’est pas en reste. On dirait des gens sortis des légendes anglaises mais qui ne s’accomodent pas trop du monde dans lequel ils sont arrivés.

J’ai donc rencontré mes compagnons de baignades, de balades et de beuveries des prochains jours. Et, en effet, on passe nos fins d’après-midi à boire quelques bonnes bières devant le couché de soleil sur la mer, un truc que j’avais pas fait depuis un petit bout de temps (sauf en Gaspésie, mais fallait se battre contre les moustiques alors ça compte pas).

Huanchaco, et Trujillo, c’est des endroits qui font pensé un peu à l’Iran, bizarrement (avec la liberté de s’amuser en plus, j’imagine). C’est très désertique avec des montagnes qui ont l’air très vieilles, pleines de sables. Ca ressemble aux montagnes vers Yazd je trouve. Et puis Trujillo, comme Piura, ça a un côté asiatique, un peu bordélique avec de tout partout. Les marchés ressemblent aux bazars débordants qu’on peut trouver en Inde, au Népal ou en Thailande, ou même en Iran (mais quand même en moins clinquant). C’est pas une très belle ville, mais elle buzz de vie, de couleur, d’activités. Autour de Trujillo, il y a beaucoup de ruines et autres “complexes archéologiques” pré-incas. Des civilisation du soleil, du désert et de la mer qui, là encore, rappellent l’Iran. Des grandes constructions en terre, du marron-sable uniforme partout et des gravures belles et simples représentant le plus souvent des vagues, des poissons et des pélicans. A un moment (moyen âge européen), cette ville, qui s’appelle Chan Chan (et, donc, en plus de penser à l’Iran, je me chante du Buena Vista Social Club, c’est un drôle de mélange), faisait 20km de long et abritait environ 200 000 personnes, ce qui, pour l’époque, en faisait une sacrée cité. Mais quand on voit le côté aride de l’endroit, on se demande comment ils se nourrissaient. Mais j’ai pas plus exploré la chose que cela.

De Trujillo, je suis allé, de nuit, à Lima. Après des adieux déchirants et de nombreuses promeses de retrouvailles futures (à Montréal, en Equateur, en Angleterre, en France…) avec mes amis anglais, je monte dans le bus. Lima est une ville gigantesque enfin qui en a l’air. Il ya de nombreux quartiers différents et je n’en ai découvert que très peu. Je devais voir un ami d’ici mais finalement il était trop occupé dans la préparation d’un festival de psy et l’arrivée des fêtes de fin d’année. Donc je décide de découvrir la ville tout seul. Je pense que c’est chouette comme endroit si de gens qui y habitent te font découvrir des endroits cachés ou moins fréquentés. C’est un peu le problème de toutes les grandes villes : il y a à la fois trop de choses et trop de gens, et en même temps, tout seul, tu reste un peu seul et c’est plus difficile de sortir des chemins balisés. Cela dit, je passe quand même des moments rigolos et, parfois surréalistes.

J’arrive donc un dimanche matin. Je trouve un hostal et je repart l’après-midi au centre historique pour me promener. Arrivé là-bas, je tombe sur une large place, chargée de décorations de noël. J’arrive au moment crucial du changement de la garde présidentielle. Une fanfare de la marine péruvienne fait de la musique. C’est un mélange de musique militaire et de chants de noël. C’est à la fois très moche, dégoûtant et dégoulinant et très rigolo. La musique militaire… Je pense que c’est une déformation familiale, mais je trouve ça horripilant. Cela dit, je suis comme paralysé, obnubilé, je ne sais comment le dire, mais c’est fascinant ces militaires (des tueurs, en principes) qui jouent de la musique en l’honneur du petit Jésus et de la débauche commerciale. C’est rigolo et en même temps, ça montre la collusion du capitalisme, du système militaire et de la religion, c’est beau… De là, je vais au quartier chinois, on m’a dit que ça valait la peine. Si le reste des rues que j’avais croisées jusqu’ici étaient vides, là, c’est blindé. Du monde et du monde, à plus savoir qu’en faire. Les voitures ne circulent plus. Pourtant, les magasins sont pas incroyables : c’est tout kitsch et clinquant, surtout de la décoration de noël. C’est pas forcément le genre d’endroit où “on trouve tout”. Par contre il y a plein de “chifas”, des restaurants de fusion chinoise et péruvienne. Alors je m’arrête pour manger un bout avant de continuer ma visite.

Le soir, je tombe sur une “feria independiente del Peru” avec plein de petits stands. On se croirait un peu dans le Mile End, le quartier hipster de Montréal. Les mecs ont tous des barbes bien taillées avec des shorts et des t-shirts dans leur short et plein de tatouage. Les prix sont en moyenne 3 ou 4 fois plus chers qu’ailleurs. Mais je tombe sur un super concert de ska-punk et, donc, je reste un peu à profiter de cete musique revendicative. Le lendemain, je vais me promener dans Miraflores : le quartier bourgeois (plus plus) de Lima. Le front de mer ressemble à une série californienne : tout propre avec de grands immeubles modernes (semi-design). La côte, à Lima, est formée par une plage que longe une grosse route au-dessus de laquelle s’élève, sur tout le long de la ville, une haute falaise qui a l’air très friable.  A partir du haut de cette falaise, les constructions commencent. Mais le bord de la falaise est largement aménagé (surtout à Miraflores) en parcs avec des arbres et des fleurs, très joli. Il y a même des gens qui font du parapente du haut de cette falaise, emmenant des touristes en bi-place faire un vol entre les immeubles de la ville et au-dessus de la mer. La mer elle-même a l’air sale et est remplie de surfeurs et apprentis-surfeurs.

Un soir je me retrouve dans un restaurant créole (je sais pas trop ce que ça veut dire créole au Pérou, faudra que je me renseigne). C’est un peu chic, mais pas très cher, avec un pianiste qui joue. Il a l’air de s’ennuyer ferme. Comme je suis seul et que je m’assoie pas loin du piano. Il me parle un peu. Découvrant que je suis Français, il décide de jouer la Marseillaise. Il a l’air content de me faire ça alors j’ose pas lui dire que j’ai horreur de cette chanson de nationalistes guerriers. Il me donne sa carte. Si jamais vous passez à Lima et que vous avez besoin d’un pianiste qui peut jouer pour “toutes occasions” (notamment la Marseillaise, rappelez-vous) ou pour prendre des cours, c’est votre homme. Il est très gentil mais il a pas l’air super content de devoir jouer dans un restaurant un peu guindé où le seul à applaudir à la fin de ses morceaux, c’est moi…

Bref, Lima, c’était rigolo mais ça ne m’a pas enchanté plus que ça. Je pense que ça prend plus de volonté, plus de curiosité et peut-être des amis sur place pour faire découvrir. Puis c’est vraiment une grande ville. J’en repars au bout de quelques jours pour aller à Cusco, dans les montagnes, rejoindre Arthur, Camille, Dom et Myriam. C’est un long trajet de presque 24h. Je décide de prendre un bus confortable en me disant que comme c’est long, c’est mieux d’être bien assis. Ca commence pas si bien : on me change de bus, d’horaire, je poireaute un bon moment à la gare des bus. Mais, en soit, le trajet comment pas trop mal avec un coucher de soleil, un petit film. On met un bon moment avant de sortir de la ville. Dans la nuit, on s’arrête à plusieurs endroits. Ca monte, et ça monte en altitude. La nuit, on entend plusieurs personnes qui vomissent. Moi même je me sens un peu faible avec mal de ventre. Le soleil se lève sur un paysage magnifique : chaque vallée est différentes, l’une désertique, l’autre luxuriante, la suivant ressemble au Népal, une autre aux Alpes et la dernière à la mer Méditerrannée sans la mer.

Après ce long trajet, j’arrive enfin à Cusco. Je tremblotte, j’ai les guibolles qui flageollent, le tournis après avoir passé tant de temps assis et être arrivé assez haut en altitude. Finalement ça passe vite et je vais à la recherche de mon hostal. C’est très flou, je pense que Arthur et Camille, comme Dom et Myriam n’arriveront, au plus tôt que le lendemain, alors je veux me poser tranquillement et commencer à penser à faire des courses de noël. Finalement je trouve la rue et je commence à monter. Ca monte beaucoup. C’est long. C’est haut. Je fatigue. Je me maudit un peu d’avoir choisi cet hostal. Finalement j’arrive, je m’assied, je commence à discuter. L’un des gars sur place me dit que quelqu’un m’attendait. Le temps que je comprenne qui, Arthur arrive et s’ensuit une grande et belle embrassade.

Chambalabamba

Cela fait un petit bout que je suis à Chambalabamba, d’ailleurs je sais pas trop combien de temps et en même temps j’ai l’impression que ça passe super vite. C’est un peu comme Pokara ici, une sorte de trou noir qui t’encourage à rien faire, qui te happe : les jours passent et ne se ressemblent pas toujours, enrobés par une douce torpeur.

Alors Chambalabamba c’est quoi ? C’est une communauté intentionnelle, financée par un américian devenu riche malgré lui. Alors, en principe (en pratique, naturellement, c’est différent). N’importe qui peut venir s’il ou elle s’y sent bien et que les autres “résidents” aussi le sentent bien. Il n’y a pas de règles mais seulement des “accords” communs fondés autour de trois principes : l’harmonie, l’unité et l’intégrité personnelles. Les décisions se prennent de manière informelle lorsqu’il n’y a pas trop de monde ou alors plus formellement avec des techniques de facilitation fondées sur le consensus. Chaque famille ou chaque résident à son propre espace de vie privée et il y a une cuisine commune où, tous les jours de la semaine (sauf le weekend) est cuisiné et dévoré un repas communautaire. Là-dessus, viennent s’ajouter des volontaires qui peuvent rester aussi longtemps qu’ils le souhaitent, mais en général c’est préférable de rester entre un et trois mois. Les volontaires travaillent tous les matins, sauf les weekend, et ils sont (on est) logés dans la maison des volontaires.

En pratique, en tant que volontaires j’ai surtout fait du désherbage. Alors on est censé être content de faire du volontariat parce qu’on apprends plein de choses et tout, mais, pour ma part, mon volontariat aura été la partie décevante. Même d’un point de vue agriculture, j’aurai pas appris grand chose. Par contre les rencontres dans la communauté auront été sympa et intéressantes. Il y a trois familles avec des enfants et deux célibataires qui vivent ici. Plusieurs autres personnes sont en voyages de manière plus ou moins indéterminées. On était 4 volontaires, maintenant 5. Pendant plusieurs semaines j’étais le seul à parler espagnol et anglais alors je me suis retrouvé à être le traducteur de service. Il y a aussi plein d’enfants qui crient et courrent partout. Ils vont à une “école alternative”, dans la communauté, 3 matinées par semaines. C’est une école libre, sans enseignant et, supposément (mais j’y connais rien), fondée sur la pédagogie Montessory.

C’est aussi un lieu végétarien et sans alcool. Enfin j’ai quand même bu quelques canons et fait quelques sorties/fêtes avec certains de la communauté. Le premier vendredi on est allé à Loja (à une heure d’ici) avec Keta et Miguel, voir le festival d’arts de rue. On s’est retrouvé à se balader dans les rues blindées, à voir des amis de Miguel, vers minuit et quelques on a traversé la ville pour allé dans un hangard où il y avait une convention de jonglerie. Il n’y avait que des mecs dans ce hangard, c’était bizarre. Le dimanche les filles de la communauté (entre 9 et 13 ans) organisaient un festival avec des activités de sensibilisation à la protection de la faune maritime. C’était mignon mais il y avait pas grand monde, surtout des amis des gens de la communauté qui étaient probablement déjà convaincu. (Par contre, c’est les volontaires qui nettoient le lendemain, pas les gamines qui organisent… héhé).

Un jeudi, Miguel nous invite chez lui pour faire un Temazcal. Il habitent plus haut dans la vallée. C’est plus sauvage, plus montagnard. C’est beau. On suit une rivière bordée d’arbres, certains en fleurs, les montagnes assez abruptes sur les bords. De loin, on dirait des paturages alpins mais en fait c’est beaucoup plus sec. Et tout en haut commence la “rain-forest”. La maison elle-même est en haut d’une côte bien abrupteet donne sur la vallée. Les pièces sont rustiques mais aérées et belles. Presque tout est fait en auto et éco construction. On s’installe, on se pause puis on va chercher du bois dans la forêt pour chauffer les pierre. Un Temazcal, c’est genre une cérémonie spiritualo-médicinale : l’idée est de se faire suer un bon gros coup (quatre bons gros coups) pour te purifier, te nettoyer et te remettre d’aplomb. Pendant que les pierres chauffent, on chante des chansons. Les enfants entrent pour une première session de hutte à sudation puis c’est le tour des adultes. On commence par prendre une dose “homéopathique” de San Pedro pour centrer notre énergie et nos pensées. Et là commence deux bonnes heures de sueur, parsemées de prières, de chants, de rituels. On va passer quatre portes. Entre chaque on ouvre la hutte et on fait rentrer 7 nouvelles pierres. Donc, en théorie, c’est de plus en plus chaud. La première porte est pour notre enfance, la deuxième notre adolescence, la troisième lorsque l’on est adulte et la quatrième pour notre vieillesse. A chaque porte, on aborde d’autres thèmes pour penser, prier, chanter. Les pierres sont les “abuelitas”, les grand-mères car elles sont si vieilles qu’elles apportent la connaissance depuis l’aube des temps. Le symbolisme de la cérémonie est intéressant et simple. Cela dit, le côté prière me laisse un peu de marbre. En ressortant de là je me sens presque saoul, ça tourne et je suis épuisé.

Vilcabamba est un village très tranquille, avec peu de vie nocturne. Mais le samedi soir, “el cuerpo lo sabe”, faut aller festoyer un peu. On rejoins les amis de Keta et Miguel qui jouent dans un bar. Ca me rappelle les bar en Asie, avec des bouts de toits, des trucs construits un peu à l’arrache (à la raph ?) en hauteur, un feu, une scène, un billard, des bières. La musique est de style “festival latino”, c’est dansant et vraiment bien joué. Après, y a un DJ reggeatone, c’est moins la classe. D’ailleurs le public est divisé entre un groupe (plutôt cosmopolite, dirais-je) venu pour le groupe de musique et le groupe (plutôt équatorien) venu pour le DJ. Même dans la fête on retrouve les divisions sociales locales.

Le dimanche soir, c’est la nouvelle lune, la Shiva Moon. Keta organise une soirée feu Chai, Chillom, Chapati. Tous les hippies de la vallée se rejoignent à Chambalabamba , tous ceux qui ont voyagé ou habité (jusqu’à 30 ans quand même) en Inde, les anciens Sadhus et les habitués des Ashram du Nord. Les Shivaïtes du coin qui se rassemble autour du feu, avec des tablas, un harmonium, des guitares et qui chantent des mantras en fumant des Chilom, en buvant du happy thé et en mangeant des (super bons) chapati. On se croirait à la maison tiens ! Ce même soir, Mazzi, le gérant d’un restaurant de falafel à Vilcabamba, me fait essayer le Rapé, une “médicine” amazonienne. C’est un mélange de tabac, de cendres de certains arbres et de plantes médicinales. Tu te le fait souffler dans le nez à l’aide d’une sorte de serbacane. Ca fait une sensation bizarre genre une froide brûlure qui remonte tout ton cerveau d’un côté puis de l’autre, jusqu’à l’arrière du crâne. Tu pars en flêche loin puis tu lâche une petite larme et ça se calme, et tu te pose. C’est censé être très bon pour te centrer et nettoyer tes sinus. Aussi, le mélange là était censé donner des rêves lucides. Mais c’était une bonne expérience.

Voilà, la vie quotidienne à Chambalabamba. J’y ai pas trouvé ce que je cherchais, mais j’y ai quand même trouvé un petit peu de bonheur, des belles personnes, pas mal de rires et de moustiques. Je pars lundi prochain pour le Pérou et de nouvelles aventures.